Avec ce beau soleil et ce bon vent, il
est temps de larguer les amarres pour de bon. Puis j'ai entendu dire
que le Black Pearl avait été libéré du sort dont il était
victime et que Jack Sparrow était à nouveau son capitaine. Quel
drôle de personnage ce Jack, il me fait pleurer de rire. Quand il
monte à bord, il est plus que prudent de mettre les barils de rhum
sous bonne garde.
J'étais ainsi dans mes pensées,
confortablement installée sur le pont, me laissant
caresser par le soleil et cette douce brise. Lorsque la vigie se mit
à crier, navire en détresse. Mon équipage commençait déjà à
mettre un canot à la mer. Sacre bleu, qui leur en avait donné
l'ordre. A chaque nouveau départ, il faut changer une partie de
l'équipage et tout est à refaire. C'est toujours la même chose,
ils embarquent pour gagner quelques pièces pour les dépenser dans
le Rhum, sans faire attention qu'ils ont été recrutés par une
femme, et ne voyant que la compagne du Capitaine, ils agissent comme
s'ils étaient les seuls maîtres à bord. Nous avons beau ne plus
être en 1700, où les femmes pirates devaient cacher leur féminité,
il faut enfiler pantalons. Pendant qu'ils jouent au " bon samaritain",
je vais enfiler ma tenue, il ne manquerait plus que ce naufrage, n'en
soit pas un, et être obligé de saborder la Rosée du Matin II, qui
vient de se refaire une beauté.
De retour sur le pont, un : «
Attention V'là le C'ptain » se fit entendre, et on dit que
l'habit de ne fait pas le moine. Ils s'écartèrent, et notre hôte
se mit à gémir : "Je dois être mort, je suis en face
de Mary Rread". Quel honneur d'être comparée à elle. Je me
suis empressée de le assurer en lui certifiant qu'il était bien vivant et qu'il
était le bienvenue à bord. J'envoyais un matelot préparer la
cabine des invités et un autre en cuisine, pour prévenir le Bosco
que nous serions deux à servir sur le pont.
Le temps de signaler aux gardes côtes
que nous avions secouru le passager de la coquille de noix qui avait
pris l'eau, qu'une agréable odeur de bacon grillé, venait me
chatouiller les narines, mais ma gourmandise allait attendre, mon
regard s'étend arrêté sur mon invité, qui avait un certain
charme. Il n'avait pas ce teint hâlé de ces hommes qui vivent en
pleine mer, mais il avait un petit truc, qui ne me laissait pas
indifférente. En le voyant avec ce maillot, que portent les marins,
il me vint l'idée de le garder à bord, il y a toujours de quoi
occuper un novice sur un trois mâts, en échange du gîte et du
couvert. J'en fis part à mon second, afin qu'il prévienne la terre
ferme, que ce n'était pas la peine d'envoyer une vedette, que nous
gardons notre rescapé jusqu'au prochain port.
Bosco me menaça de me faire jeûner
pendant une semaine, si je ne venais pas immédiatement manger ses
œufs au lard. Je me suis faite une raison depuis toutes ces années,
le vrai chef à bord c'est le Bosco. Avant, toutes choses, j'ai quand
même annoncé les termes du contrat qui allait désormais lier cet
homme à la Rosée du Matin II. Il en a été ravi, car il avait
toujours rêvé de naviguer sur un trois mâts. Qu'il avait même été
au salon nautique pour connaître les conditions pour faire un stage
sur le Belem. En attendant, il avait pris des cours de voile, mais
avec son expérience du jour, il voit bien que ce n'est pas si
facile de naviguer en pleine mer. Il ne s'était pas rendu compte, qu'il était si
loin des côtes et quand le vent tomba, il s'est trouvé perdu au
milieu de nulle part, et l'eau commençait à rentrer dans son
embarcation. J'en ai oublié toutes mes politesses d'hôtesse et je
suis partie d'un grand éclat de rire. Ses yeux couleurs océans me
regardaient hésitant entre prendre la couleur noire de la colère,
le gris de la tristesse ou le bleu de la gaîté. Je lui ai dit que
j'étais désolée, mais que c'était bien la première fois que je
rencontrais quelqu'un qui se retrouvait à plus de 1000 kilomètres
des côtes sans s'en apercevoir. Si mes paroles se voulaient
ironiques, mon regard ne voulait guère se détacher du sien et je
lui souriais bêtement.
Le menuisier m'informa que l'escalier
principal qui menait à ma cabine était enfin remis en état qu'il
ne restait plus qu'à le vernir. Envoyer ma nouvelle recrue grimper
dans les vergues étant très prématuré, je la confia, à celui qui
est tout indispensable sur un trois mâts que n'importe quel autre
membre d'équipage. De mon côté, j'allais faire le tour du navire,
pour m'assurer que tout le monde était bien à son poste. Quelques
dauphins nous accompagnaient, en faisant des pirouettes, les voir
ainsi s'amuser me donnait l'envie de sortir ma peau de phoque de sa
malle, mais cela pouvait se révéler dangereux, une selkie qui
repart dans les eaux avec sa peau, ne revient jamais et je n'avais
pas envie de quitter cette vie d'humaine.
Le pont était désert, les hommes
étant soit attablés, soit dans leur cabine pour se détendre
avant de prendre leur quart. Seul, un homme était devant le grand
mât, les yeux levés vers le ciel d'un bleu azur. Parfois de drôles
d'idées me viennent, je lui demandais, s'il voulait grimper. Il
avait l'air si heureux de ma proposition. Cependant, je lui ai
précisé que nous n'étions pas sur un navire école et qu'il n'y
avait pas autant de sécurité que sur le Belem. Il m'a assuré qu'il
était conscient du danger, mais qu'il ne voudrait pour rien au monde
rater une telle occasion. On aurait cru qu'il avait fait ça toute sa
vie,il était aussi à l'aise qu'un chamois dans les montagnes. Nous
avions l'océan, le ciel rien que pour nous, quoi de plus romantique
qu'un superbe couché de soleil vu d'un grand mât.
Nous étions bien là haut, mais il
fallait redescendre, le deuxième service allait être servit, et je
ne voulais pas prendre le risque de mettre le Bosco en colère.
Après le dîner j'invitais les yeux
couleurs océan à venir dans ma cabine déguster un de mes rhums
arrangés. Il a beau ne pas être un pirate, il a tout de même un
sabre, qui serait dommage de laisser en inactivité. Je n'ai pas eu
le temps de sortir les verres, qu'il m'avait déjà inviter à faire
un de ces grands nettoyages, que j'affectionne. Un magnifique
tatouage, digne d'un pirate, aurait dû me mettre en alerte. Mais, je
me suis laissée embarquer sur les vagues du plaisir...
Lorsque en octobre 2015, Dark Destroyer ( Surnoms que les supporters Néo-Zelandais lui ont donné le 06 octobre 2007) a annoncé qu'il prenait sa retraite Internationale, nous savions qu'un jour, il ne serait plus le premier à sortir des vestiaires en Rouge et Noir.
Son histoire ne s'est malheureusement pas terminée sur une victoire, ni en Bleu, ni aux couleurs du Stade Toulousain son club depuis 11 ans avec lequel il a été 3 fois champion de France et 1 fois champions d'Europe. C'est le plus grand regret que l'on puisse avoir lorsqu'un grand joueur quitte les terrain, ne pas les voir faire ce dernier tour de terrain avec un trophée. Thierry Dusautoir a été le 79ème Capitaine du XV de France. Son premier capitanat date de juin 2009 face à la Nouvelle Zélande à Dunedin. Quinze ans après sa dernière victoire en Nouvelle Zélande, le XV de France s'impose 27 à 22. Son seul titre en équipe de France est le grand chelem en 2010, avec la victoire contre l'Angleterre, au Pays de Gall, qui a marqué la fin de l'état de grâce du rugby Français.
Il a su être ce représentant que nous attendions. En 2011, il a su parler à Marc Lievremont, qui en sélectionnant ces joueurs leur avait confiance et pourtant il y avait comme une désunion. Il a su parler à ses joueurs pour amener ce XV de France jusqu' en finale. Et quel beau souvenir quand pour cette finale, (coupe du monde en 2011), il a amené ses coéquipiers à faire ce grand V, face aux All Black pendant leur haka. Il restera pour moi, notre Capitaine. Celui a qui je n'ai jamais osé, demander la moindre photo, le moindre autographe, lorsqu'en allant rejoindre le bus, il me croisait avec ce charmant sourire. Mais ces souvenirs ne sont-ils pas les plus beaux...